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Tais-toi et marche !
4 novembre 2012

Anyong aseo !!!

Je pensais ne pas vouloir écrire sur le chemin, comme si la compagnie des mots avait du me priver de celle du monde, de celle de tous les autres et surtout de celle de mes trois comparses, Christine, Dany et Béatrice. Aujourd’hui que je reprends ma pérégrination seul, après que chacune a retrouvé la chaleur de son foyer, je me sens parfois un peu seul, loin de ma langue maternlle qui toujours me manque, perdu dans la marée des Coréennes qui frappent les côtes espagnoles comme l’Erika en son temps... Il semblerait qu’un producteur asiatique suffisamment malin ait pondu une version 3 de la BOUM, dans laquelle notre jeune et sémillante Vick nationale, œil bridé, Anglais déplorable, équipement high-tech dernier cri, se trouve un bel amoureux européen sur le chemin de Compostelle. Ni elle, ni son sac à dos ne reverront donc jamais Séoul… Je vous laisse imaginer le pouvoir que cette comédie à l’eau de « kim-chi » a pu avoir sur le dernière génération pré-pubère de ladite Corée du Sud ! Moi qui maitrise en tout et pour tout 3 mots de cette langue à la calligraphie si étrange, j’ose à peine vous dire le « carton plein » que je récolte chaque soir dans les auberges quand je salue, dans selon les codes et l’étiquette, des hordes de pucelles en mal d’amour. Je dors d’ailleurs les deux mains sur mon bâton de pèlerin toutes les nuits de peur qu’elles ne se sentent l’âme d’héroïnes enhardies ! Les pauvres, si elles savaient…

 

A l’heure de vous écrire ces quelques mots, je viens d’essuyer 22 km de désert absolu sous une pluie battante. Quand j’écris désert, entendez désert humain, sans aucun village ni âme qui vive, parce qu’il s’agit en fait d’une plaine fertile, comparable à celle de la Beauce les cailloux en plus, mais où personne ne vit, personne d’autre que le vent et les nuages qui déversent en ce jour des quantités juste ahurissantes de flotte sur mon pauvre poncho (merci Christine) qui peine à drainer toute la prodigalité des cieux en furie. Rien de notoire à relever dans le paysage sur des kilomètres à la suite, c’est donc là que le chemin se fait plus mental, qu’il s’insinue jusqu’au fond des tripes et qu’il renverse toutes les certitudes pour laisser au doute la part la plus belle. L’esprit éructe un instant, il hésite et se demande s’il trouvera suffisamment de force pour rallier la prochaine étape, elle semble si lointaine, invisible sur l’horizon qui ne déroule rien d’autre que des hectares de solitude et de désespérance. Les hasards n’existent pas, tout ce qui arrive a du sens, enfin je l’espère. Il doit donc y en avoir un dans ces 3 heures perdues, comme moi perdu, les deux pieds dans le purin d’abord, puis dans le canal ensuite poussé par une bourrasque alors que je tentais de me rincer les grolles. Il est 12.09 mais je n’irai pas plus loin aujourd’hui, le courage soudain me manque ! La sagesse populaire tient que « tout ce qui ne tue pas rend plus fort »… je devrais donc arriver ce soir baraqué comme SuperMan ! Il me faudrait plutôt penser qu’accepter la difficulté, c’est cheminer vers cet adulte que je peine à devenir.

Une nuit suffira parce que quoiqu’il m’arrive, j’avancerai, confiant, je sais que le chemin est prodigue et qu’il mettra sous mon pas tout ce dont j’aurai besoin, il ne me reste qu’à croire et à espérer des jours meilleurs et surtout,  une douche bien chaude pour laver cette odeur abjecte de purin qui me dégoûte…

Je rêve pour une fois d’une sieste au chaud, d’un bon thé et pourquoi pas d’un bon apéro avec celles et ceux que je trouverai à l’auberge, probablement comme moi, rincés et épuisés, mais toujours heureux de partager leurs aventures, dans une autre langue que le Coréen, sinon la conversation va tourner court !

La vie a parfois un goût doux comme le miel et parfois, comme aujourd’hui, une saveur amère comme une tartine de merde beurrée bien épais. L’important, ce n’est pas tant le goût ! L’important c’est la force qu’on trouve à se réinventer ses lendemains.

Je dormirai ce soir heureux comme tous les autres, parce que rien ne saurait me faire hésiter, pas même une fosse à purin, ni deux trois mots de Coréen !

 Bises Seb

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Commentaires
M
Courage!...Je suis avec toi
Tais-toi et marche !
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